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Quatre ans après l’assassinat de Samuel Paty, le procès d’un engrenage mortifère s’ouvre ce lundi à Paris
2024-11-04
Près d'un an après le procès des mineurs impliqués, la cour d'assises spéciale de Paris rouvre ses portes pour juger les huit adultes accusés dans l'assassinat de Samuel Paty, un professeur d'histoire-géographie décapité pour avoir enseigné la liberté d'expression. Ce procès, chargé de symboles, survient après ceux de l'attentat du 14-Juillet et avant celui de l'attentat à la basilique de Nice, formant une sombre trilogie de notre histoire contemporaine.
Un Drame Annoncé, une Tragédie Inévitable
Le 16 octobre 2020, Samuel Paty, 47 ans, quitte le collège du Bois-d'Aulne à Conflans-Sainte-Honorine, l'esprit alerte. Depuis dix jours, son cours sur la liberté d'expression a semé le trouble chez certains parents d'élèves et dans la communauté éducative. Il sent une cible dans son dos, et à juste titre.Dans le cadre du procès des attentats de janvier 2015, Samuel Paty a présenté deux caricatures de Mahomet publiées dans Charlie Hebdo. Prenant soin de proposer aux élèves qui le souhaitaient de sortir quelques instants ou de détourner le regard, il n'a pas anticipé les conséquences désastreuses de son geste. Une élève turbulente, Z., prétendra ne pas avoir assisté au cours, trompant son père qui la croit.La Campagne de Cyberharcèlement Fatale
Brahim Chnina, un père d'élève, publie alors trois vidéos dénonçant une offense islamophobe et ciblant Samuel Paty. C'est le début d'une campagne de cyberharcèlement qui aura une issue tragique. Abdelhakim Sefrioui, un militant islamiste franco-marocain, fustige dans une vidéo un "voyou enseignant", attisant les tensions autour du collège.L'Acte Barbare d'Abdoullakh Anzorov
C'est dans ce climat de peur et de tension que le Russe d'origine tchétchène, Abdoullakh Anzorov, 18 ans et radicalisé, entre en contact avec le père de Z. Il attend Samuel Paty à la sortie des cours, le roue de coups de couteau en criant "Allah akbar" et le décapite. Puis il revendique son crime en publiant une photo de cette scène d'horreur sur Twitter, avant d'être abattu par la police.Les Condamnations des Mineurs Impliqués
Le 8 décembre 2023, le tribunal pour enfants de Paris condamne six anciens élèves du collège de Samuel Paty. Z., l'adolescente qui a menti, écope de 18 mois de prison avec sursis probatoire. Les peines s'étalent de 14 à 24 mois avec sursis, et 6 mois ferme pour le collégien qui avait fait le guet avec le terroriste. Cinq ados l'avaient aidé à identifier sa proie, moyennant quelques billets.La Chaîne de Responsabilités des Adultes
À partir de ce lundi, huit adultes âgés de 22 à 65 ans comparaissent devant la cour d'assises spécialement constituée. Six d'entre eux répondent d'"association de malfaiteurs terroriste", un crime passible de 30 ans de réclusion criminelle. C'est le cas de Brahim Chnina et Abdelhakim Sefrioui, qui rejettent toute part de responsabilité. Yusuf Cinar, Ismaïl Gamaev, Louqmane Ingar et Priscilla Mangel sont accusés d'avoir incité Anzorov à passer à l'acte, via Snapchat ou Twitter. Naïm Boudaoud et Azim Epsirkhanov, quant à eux, l'ont aidé à se procurer ses armes. Jugés pour "complicité d'assassinat terroriste", ils encourent la réclusion à perpétuité.Un Procès Ultra Médiatique, une Quête de Justice
Depuis quatre ans, Mickaëlle Paty, la sœur de Samuel, défend la mémoire de son frère. Elle s'apprête à "plonger" dans ce "procès ultra médiatique", qui s'annonce comme sept semaines d'audience douloureuses jusqu'au 19 décembre au palais de justice de Paris. Du 10 au 28 février prochains, Brahim Aouissaoui y sera jugé à son tour pour l'attaque au couteau qui fit trois victimes, à Nice, le 29 octobre 2020, treize jours après la mort de Samuel Paty.